24 mai 2008
Homophobie et caetera: des mots piégés
Classé dans : Christianisme — Vincent Pellegrini @ 0:12 Modifier
Ex-dissident et grand littérateur des mécanismes de la désinformation, Alexandre Zinoviev a excellé à démontrer que la sémantique, lorsqu’elle tourne à l’utilisation détournée du langage, permet de piéger les mots pour la communication de masse. Dernier exemple en date, celui d’une responsable d’«association valaisanne mixte de personnes homosexuelles» qui se félicitait d’avoir fait passer le message suivant à des médiateurs scolaires: «C’est important d’éduquer la jeunesse afin de lui faire comprendre que l’homophobie, c’est comme le racisme.» J’ose espérer pour ma part que lesdits médiateurs n’ont pas été abusés par cette utilisation piégée du mot homophobie. Car, en effet, le sens du mot homophobie n’est pas le même pour tout le monde. Pour une militante homosexuelle est homophobe toute personne qui ne place pas sur le même plan qualitatif et social les actes homosexuels et hétérosexuels. Pour Benoît XVI et l’Eglise, par contre, si la personne homosexuelle a droit à un respect absolu car elle est aimée par Dieu comme tous les autres humains, les actes homosexuels doivent être qualifiés moralement et objectivement d’intrinsèquement désordonnés (sans préjuger de la culpabilité de la personne d’ailleurs). Les comportements homosexuels ne devraient donc pas constituer un modèle social et éducatif. Pour la militante homosexuelle le pape est ainsi homophobe ainsi que tous ceux qui le suivent, fussent-ils charitables ou non.
L’idéologie de l’information utilisera dès lors d’autres mots pour désigner les «homophobes» et autres refuzniks osant briser «les tables de la loi de la pensée officielle» (Michel Maffesoli). Il s’agira d’adjectifs toujours non définis mais terriblement stigmatisants comme «intolérants», «conservateurs», «extrémistes» et j’en passe. Aujourd’hui, le nominalisme politique consiste à étiqueter grâce à un vocabulaire restreint mais efficace tous les esprits libres et non alignés sur les idées très largement à la mode chez les principaux vecteurs d’opinion. Ce n’est pas difficile, puisque le journalisme et la politique se réduisent de plus en plus souvent à de la communication.
Comme du temps de Socrate, notre société aurait besoin de sages qui refondent la politique et le débat démocratique en définissant l’utilisation et le vrai sens des mots pour échapper au manichéisme ambiant. En politique comme en journalisme ou en philosophie, tout commence par la définition des mots.
Vincent Pellegrini
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