dimanche 10 juin 2012

Histoire de l'ancienne messe


LITURGIE

Libéralisé par Benoît XVIe l’ancien rite a connu une évolution


homogène depuis les temps les plus reculés.


Histoire d’ancienne messe

VINCENT PELLEGRINI


En 2007, le pape créait la surprise

en libéralisant l’ancienne

messe en latin ou messe dans «la

forme extraordinaire» du rite latin,

la nouvelle messe de Paul VI

en 1969 étant le rite latin dans sa

«forme ordinaire». L’ancienne,

messe qui fut célébrée encore

durant le concile Vatican II, est

appelée aussi tridentine du nom

du Concile de Trente au

XVIe siècle qui suscita le retour à

une version plus ancienne et

plus pure de la messe. La messe

selon la forme extraordinaire fut

célébrée de manière universelle

dans l’Eglise catholique romaine

jusqu’en 1969 et elle est extrêmement

ancienne. Cette antiquité

et cette continuité expliquent

pourquoi Benoît XVI,

dans son motu proprio Summorum

Pontificum, veut garder

cette messe comme un trésor liturgique

de l’Eglise pour les fidèles

qui le désirent . Son but n’est

d’ailleurs pas d’opposer cette

messe ancienne à la forme ordinaire

du rite latin (nouvelle

messe) mais au contraire que les

deuxrites se fécondent mutuellement.

Pour certains observateurs

attentifs aux propos du

pape, nous n’en sommes qu’au

tout début de la «réforme de la

réforme liturgique». Le Vatican

va en outre sortir ce mois-ci une

instruction sur l’application du

motu proprio concernant l’ancienne

messe.


Aux temps apostoliques


L’Eglise a toujours fait remonter

l’institution des principaux

rites de la Messe aux temps

apostoliques. Ainsi, Saint Basile

affirme en conformité avec les

Pères, que les paroles de la Consécration

sont celles-là mêmes

qui ont été prononcées par Jésus-

Christ. Quant au canon romain

(partie centrale de la

messe avant et après la consécration)

ou Canon 1 qui peut aussi

être dit avec la nouvelle messe,

la tradition l’a attribué également

aux Apôtres de manière

assez substantielle. C’est du

moins ce qu’expliquent par

exemple Saint Augustin et le

pape Vigile. Quoi qu’il en soit, le

canon est très ancien.D’ailleurs,

les Apôtres ont tous commencé

ensemble la liturgie puisqu’ils

ont vécu ensemble jusqu’aux

premières persécutions.La liturgie

romaineplongedoncses racines

jusque dans lestempsapostoliques.

Il est aujourd’hui

téméraire de vouloir reconstituer

les textes de la messe primitive

car aux débuts de l’Eglise la

loi de l’arcane interdisait la publication

des formules rituelles.

Cette publication ne se fit que

bien plus tard, lorsque l’Eglise

sortit de son silence, après l’édit

de Constantin (313).


Remarquable continuité


Au début du Ve siècle environ,

apparaît le plus copieux et le

plus ancien sacramentaire; recueil

des textes de laMesse, de la

façon de célébrer, du bréviaire,

du Pontifical et des textes de

l’administration des sacrements:

c’est le sacramentaire léonien

dont la messe ancienne que

nous connaissons aujourd’hui

(ancienne messe avec les rubriques

de Jean XXIII) est assez

proche, ce qui est remarquable.

Enfait, le pape Léonn’avait ajouté

que deux choses dans la

deuxième partie du canon: à savoir

les formules «cette hostie

(ou victime) immaculée» ainsi

que «sacrifice saint». Puis viendront

les sacramentaires gélasien,

recueil de liturgie romaine

importé dans les Gaules, et grégorien,

du pape Grégoire 1er dit

le grand élu en 590 dont la plus

grande partie est bien sûr antérieure

au pontificat de ce pape.

Dans ce dernier sacramentaire

on trouve l’ancienne messe presqu’en

tous points telle qu’elle est

aujourd’hui, tandis que le canon

subit alors son dernier ajout jusqu’à

Jean XXIII (pape Roncalli,

mort à l’aube duConcileVatican

II) avec cette formule de la

prièreduhancigitur «Etdisposes

nos jours dans la paix».Ce sacramentaire

grégorien, avec la

messe qu’il contient, sera propagé

par la France qui l’avait déjà

fait pour le gélasien, grâce surtout

au concours très actif de

l’ordre bénédictin. Grégoire le

grand atteste d’ailleurs au

VIe siècle que ses innovations

dans la messe ne furent rien

d’autre qu’un retour aux plus pures

traditions romaines. Désormais,

seules vont se perfectionner

jusqu’au XIe siècle quelques

prières comme celles de l’offertoire

et de la communion. Il y a

bien eu des ajouts dans le haut

Moyen Age, mais il faudrait plutôt

parler d’évolution homogène

et de stabilisation. On parle

d’une «liturgie émigrant en pays

francs avant de revenir à Rome

revue et francisée». Ce qui fait

dire à l’abbé Claude Barthe:

«Ainsi, on peut estimer que le

missel d’avant leConcileVatican

II reproduit la messe romaine au

moins à l’époque de saint Grégoire

VII (1073-1085). Il est, à

d’infimes détails près le missel

publié par saint Pie V en 1570.»


Le Concile de Trente


Au XVIe siècle, on constate

une période de déclin et d’altération

qui mettra en danger cette

merveilleuse unité liturgique de

la chrétienté latine et qui obligera

les érudits du Concile de

Trente à débarrasser le missel

romain de beaucoup d’additions

et messes du Bas Moyen Age,

éléments médiévaux tardifs qui

défiguraient l’harmonie des lignes

du grandiose monument liturgique

érigé par les Pontifes

romains jusqu’au VIIe siècle.

Sans oublier l’influence protestante.

Seules furent autorisées à

perdurer les liturgies datant de

plus de 200 ans. La messe dite

tridentine est donc en réalité

une oeuvre de restitution de la

messe antique qui a été menée à

bien sous le pontificat de Pie V

(d’où aussi le nom de messe de

Saint Pie V). Cette messe fut

promulguée par la très solennelle

bulle «Quo primum tempore

» qui canonise et impose

définitivement «le missel restitué

à la règle antique et au rite

des Saints Pères» selon l’expression

même du pape Pie V. Le

Saint Sacrifice était ainsi dès lors

en très grande partie fixé dans sa

forme définitive et l’on peut

même dire pour l’éternité car la

messe tridentine n’a jamais été

vraiment abolie et elle a même

fait l’objet par Benoît XVI d’un

motu proprio qui en libéralise

l’usage. C’est un trésor de la Tradition

et le joyau de l’action du

Saint Esprit dans l’Eglise à travers

les siècles. Y retourner,

comme nous y encourage le

pape, c’est aussi mieux comprendre

les racines de la nouvelle

messe, car iln’y a qu’unseul

rite latin sous deux formes (ordinaire

et extraordinaire), comme

l’a expliqué Benoît XV

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire