lundi 7 décembre 2015

Un islam équivoque


Cavalier seul

Vincent Pellegrini

Les derniers attentats de Paris conduisent à s’interroger à nouveau sur l’islam. Philippe d’Iribarne est anthropologue et directeur de recherches au CNRS. Il est l’auteur en 2013 de «L’Islam devant la démocratie» aux éditions Gallimard. Pour lui, l’islam doit sortir de l’équivoque. Il déclarait après la tuerie de Paris: «On rencontre dans l’islam deux tendances face auxquelles il est facile de prendre parti. D’un côté, un islam qui, porté par des intellectuels musulmans modernistes et quelques imams, accepte pleinement la liberté de conscience telle que l’Occident l’a conçue, se livre à une lecture du Coran attentive à son contexte historique et privilégie son message spirituel. De l’autre, un islam salafiste attaché à une lecture littérale du Coran jusque dans ses passages les plus vengeurs, qui prône une lutte sans merci contre l’Occident.» Et d’ajouter au sujet de l’islam en France: «Mais, entre ces deux tendances, où mène  un islam, sans doute majoritaire, dont le rapport à l’Occident est fort équivoque? Avec mille nuances, cet islam résiste plus ou moins sourdement à l’Occident. Même s’il ne le proclame pas haut et fort, il partage de fait avec l’islam pratiqué dans les pays musulmans un refus de la liberté de conscience, avec ce qu’elle implique de droit de quitter l’islam pour embrasser une autre religion, de droit pour une musulmane d’épouser un non musulman, de droit de respecter ou non le ramadan. Il refuse de s’engager dans une lecture critique du Coran. Ne se contentant pas de chercher à  éclairer les âmes, il déploie une pression communautaire visant à contrôler les corps, et se polarise sur la tenue des femmes. Il vise à construire une forme de contre-société marquée par le règne du halal. Certes, il n’invite pas directement à la violence, mais il tend à l’excuser, voire à la justifier au nom du bien. Il met en avant les valeurs de la République pour réclamer d’être traité à l’égal des autres religions, mais ne se sent nullement tenu de les respecter lui-même.» Pour le chercheur, cette équivoque, avec la sorte d’hostilité larvée qu’elle entretient à l’égard de l’Occident, est grave. Elle favorise, chez ceux qui sont en quête d’absolu ou à la recherche d’une identité sans faille, un engagement dans l’action violente. La formation d’imams à la française et la fermeture des mosquées salafistes deviennent urgentes.

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