lundi 23 avril 2012

Deux petits pas sur le sable mouillé


“Deux petits pas sur le sable mouillé”



Histoire vécue - Le récit bouleversant de la maladie d’une petite fille fait l’objet d’un témoignage de sa maman, Anne-Dauphine Julliand, vendredi prochain à Sion.





L’histoire commence sur une plage, quand Anne-Dauphine remarque que sa fille, Thaïs, marche d’un pas hésitant, son pied pointant vers l’extérieur. Les médecins découvrent que Thaïs est atteinte d’une maladie dégénérative. Elle vient de fêter ses deux ans et il ne lui reste que quelques mois à vivre. Alors Anne-Dauphine fait une promesse à sa fille: “Tu vas avoir une belle vie. Pas une vie comme les autres petites filles, mais une vie dont tu pourras être fière. Et où tu ne manqueras jamais d’amour.”

Il nous faut parfois une longue marche pour atteindre notre objectif, et parfois cette marche n’est que deux petits pas, deux empreintes dans le sable mouillé, puis plus rien.



Les traces dans le sable

Cela me fait penser au texte d’Ademar de Barros, poète brésilien: “Les traces dans le sable”: “Une nuit, un homme fit un rêve. Il marchait au bord de la mer en compagnie du Seigneur.  Sur le fond du ciel, il voyait se dérouler les scènes de sa vie. Il remarquait, dans chaque scène, deux traces parallèles de pas dans le sable. L'une était la sienne; l'autre celle du Seigneur. À la fin, il se retourna pour voir toutes les empreintes sur le sable. Il s'aperçut alors qu'à divers moments de sa vie, il n'y avait qu'une trace de pas. Et que cela correspondait aux heures les plus tristes et les plus sombres de sa vie. Intrigué, il dit au Seigneur: “Tu m'as assuré que Tu marcherais toujours à mes côtés. Mais je m'aperçois qu'aux périodes les plus dures de ma vie, il n'y a plus qu'une empreinte dans le sable. Pourquoi m'as-tu abandonné quand j'avais le plus besoin de Toi?". Le Seigneur se tourne alors vers lui et lui répond: "Mon enfant, mon très cher enfant, Je t'aime et ne saurais t'abandonner. Si tu ne vois qu'une trace de pas aux moments les plus difficiles de ton existence, c'est qu'alors, tout simplement, Je te portais dans mes bras...”



On ne voyait pas une petite fille malade

A la maison comme à l’hôpital, chacun se sentait bien auprès de Thaïs et ressentait le besoin de venir auprès d’elle. Dans une interview accordée à la Fondation Lejeune, en mai 2011, Anne-Dauphine raconte: “Dès le début, Thaïs avait accepté sa maladie. Elle avait compris ce qui l’attendait, mais elle ne s’est jamais révoltée. Elle vivait pleinement sa vie. Elle était, surtout, complètement habitée par l’amour. Ainsi, quand on rentrait dans sa chambre, on sentait autre chose et on ne voyait pas une petite fille malade, mais une petite fille. Comme les autres, elle pouvait être gaie, espiègle. Elle était aussi attentive, à l’écoute. D’ailleurs, parmi ceux qui sont venus la voir, plusieurs m’ont dit, après avoir lu mon livre, qu’ils n’avaient pas réalisé qu’elle ne parlait plus !”

Aujourd’hui, on se rend compte qu’il se passe vraiment quelque chose autour de ce récit, comme il se passait vraiment quelque chose autour de Thaïs. En une année, ce sont 200’000 lecteurs qui ont été touchés. Ce petit livre avec, en couverture, la photo de Thaïs marchant sur le sable mouillé, circule de main en main, de coeur en coeur. Combien ne m’ont pas dit: “Ma femme l’a lu, elle a été très touchée. Je voulais le lire également, mais depuis il circule dans la famille et je n’arrive pas à mettre la main dessus.”



Nous voulons des héros

Que ce témoignage touche tant et tant de coeurs est un signe magnifique d’espérance pour notre monde qui a soif d’héroïsme. Nous voulons des héros ! Non pas de ces héros forts, sûrs d’eux mêmes et invincibles, comme nous pensons l’être trop souvent nous-mêmes. Non! Nous voulons de ces héros qui nous montrent que nous sommes petits, faibles et fragiles. De ces héros blessés. De ces héros infirmes. De ces héros qui pleurent. De ces héros qui ne peuvent pas s’en sortir tout seuls. De ces héros qui ont besoin de la main tendue des autres. De ces héros qui ont besoin d’être portés dans les bras du Seigneur.

Car c’est bien là que nous mène la vie. La vie n’est pas un long fleuve tranquille, mais une longue maladie dégénérative de notre orgueil, de notre suffisance, de notre indépendance. Les événements de notre vie nous rappellent que nous avons besoin des autres, besoin de Dieu, que nous ne pouvons pas nous suffire à nous-mêmes.



Les aspirations de notre coeur

Et même si souffle sur notre monde moderne un courant d’idées qui voudrait supprimer la vie quand elle ne correspond pas à l’idée qu’on s’en est fait, ou proposer aux citoyens âgés de s’ôter la vie quand celle-ci semble n’avoir plus de sens pour eux, le succès du témoignage de Thaïs nous montre que notre coeur est toujours intact et que les aspirations les plus grandes et les plus généreuses y habitent toujours. Du haut de ses deux ans, Thaïs nous ouvre le chemin.



Une bombe aveuglante

Anne-Dauphine dira : “Ça me fait l’effet d’une bombe aveuglante. Sans un mouvement et sans un mot, Thaïs me livre un secret, le plus beau, le plus convoité : l’Amour. Celui avec une majuscule. (...) Comment sait-elle ? Comment est-ce possible ? Thaïs est privée de tout. Elle ne bouge pas, elle ne parle pas, elle n’entend pas, elle ne chante pas, elle ne rit pas, elle ne voit pas. Elle ne pleure même pas. Mais elle aime. Elle ne fait que cela, de toutes ses forces. A travers ses blessures, ses infirmités, ses défaillances. L’amour de Thaïs ne s’impose pas, il s’expose. Elle se présente à nous comme elle est, vulnérable et fragile. Sans carapace, sans armure, sans rempart. Sans peur. (...) Près de deux ans auparavant, en apprenant l’étendue des dégâts que provoquerait sa maladie, je m’étais posé une question : “Que lui restera-t-il ?” L’amour. Il lui restera l’amour. Celui que l’on reçoit. Et celui que l’on donne aussi.”



Olivier Dehaudt
président de Choisir la Vie



“Deux petits pas sur le sable mouillé”, Anne-Dauphine Julliand, témoignage, Éditions les arènes, 228 pages, 25 francs.

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