LIVRE. Quand un pédagogue et un théologien unissent leur talent pour décrypter les Evangiles.
«A l’école du Christ pédagogue – Comment enseigner à la suite du Maître?», tel est le titre d’un livre que viennent de publier les éditions Saint-Augustin dans la collection Perspectives pastorales 5. Les auteurs sont le théologien François-Xavier Amherdt ainsi que le pédagogue Pierre Vianin. Françoix-Xavier Amherdt est professeur de théologie pastorale, pédagogie religieuse et homilétique à la Faculté de théologie de l’Université de Fribourg. Pierre Vianin est enseignant spécialisé, professeur à la Haute Ecole Pédagogique du Valais et rédacteur responsable d’un journal paroissial. C’est un spécialiste de la lutte contre l’échec scolaire. Interview croisée des deux auteurs.
Comment ce livre est-il né?
François-Xavier Amherdt: La collection perspectives pastorales a pour but de mettre à la disposition d’un public le plus large possible les réflexions dans le domaine de la pastorale en lien avec certaines approches des sciences humaines, en l’occurrence la pédagogie.
Pierre Vianin: Ce livre est un approfondissement de mon travail de diplôme réalisé après trois ans de Formation aux Ministères en Eglise du diocèse de Sion (FAME). J’étais limité dans le nombre de pages et il y avait de nombreuses pistes que j’aurais voulu explorer. Je l’ai fait dans ce livre avec l’abbé François-Xavier Amherdt.
FXA: Le travail de Pierre Vianin m’a paru très intéressant dans son aspect pédagogique. Je trouvais qu’il était bien en relation avec la pédagogie humano-divine du Christ, à la fois pleine de bonté et d’exigence.
Comment vous êtes-vous réparti le travail?
FXA : J’ai encouragé Pierre à faire une première synthèse sur les approches pédagogiques actuelles jusqu’à la page 65 du livre. Cette partie peut toucher les parents, les enseignants et non seulement les catéchistes ou les agents pastoraux. Nous avons mené ensemble la réflexion sur la deuxième partie biblique en explorant cinq textes du Nouveau Testament où l’on voit la pédagogie du Christ à l’œuvre. Et j’ai rédigé la dernière partie sous la forme d’une synthèse théologique qui offre des applications aux catéchistes et enseignants religieux scolaires. Nous avons voulu que ce livre à deux voix ne rompe pas l’unité de la réflexion et reste très pratique.
Quelle approche pédagogique avez-vous choisie?
FXA: L’ouvrage s’appuie sur diverses approches pédagogiques qui restent complémentaires, que l’on mette l’enfant au centre ou que l’on privilégie la transmission du savoir.
PV: Nous avons plaqué sur les textes bibliques les clés de lecture pédagogiques. En faisant cela sur l’enseignement du Christ on redécouvre des aspects jamais vus auparavant.
FX: L’exégèse pédagogique commence sur les paraboles de Jésus. On voit bien que l’enseignement du Christ est diversifié selon les destinataires.
PV: Dans l’épisode des disciples d’Emmaüs, on voit par exemple que Jésus se fait proche des disciples ébranlés et qu’il est d’accord de marcher dans la mauvaise direction avec eux dans un premier temps pour bien les comprendre. Et quand il les sent prêts il les enseigne spécifiquement et ils reviennent sur leurs pas. Jésus applique la compréhension de l’élève et l’adaptation du discours. Prenons l’épisode de Zachée. Le Christ le valorise et lui donne ainsi une motivation intrinsèque. Zachée était la caricature du mauvais élève, mais le Christ croit en son «éducabilité». Pour le Sauveur, il n’y a pas d’élève irrécupérable.
Vous partez donc d’exemples précis dans les Evangiles.
FXA: Oui, par exemple lorsque le Christ dit aux disciples: «Pour vous qui suis-je?» C’est un questionnement et non un interrogatoire. La question est en effet formative et à la base d’un apprentissage.
PV: On voit que le Christ questionne souvent et qu’il pose les questions fondamentales, les bonnes questions. Il oblige les disciples à se positionner et les prend là où ils sont dans leur apprentissage pour les aider à cheminer plus loin.
FXA: Dans le miracle du paralytique l’agir et l’être du Christ sont cohérents. Le miracle est une ouverture vers la gratuité du salut et du don de Dieu, comme un signe offert à la liberté.
PV: Je suis frappé par le fait que l’enseignement du Christ est toujours une proposition, qu’il n’impose jamais.
FXA: La dernière partie du livre est une catéchèse d’engendrement. L’élève est engendré à sa véritable humanité et à la foi. Dieu divinise ce que nous avons humanisé. Le quatrième livre de la collection Perspectives pastorales parle de cette catéchèse d’engendrement.
Les deux derniers chapitres proposent des préceptes.
FXA: Les sous-titres montrent en effet bien le propos: le Christ adapte toujours son message au public auquel il s’adresse; le Christ respecte infiniment ses interlocuteurs; le Christ croit au principe «d’éducabilité»: il remet chacun debout; Le Christ part des représentations de chacun dans un esprit d’écoute, d’empathie et de non-jugement; le Christ questionne et sa vie pose question; le Christ n’hésite pas à enseigner avec autorité et à se montrer ferme si nécessaire; le Christ utilise la médiation par un jeu de présence/absence; Le Christ est parfaitement cohérent dans son enseignement.
PV: Ce livre donne des pistes dans les attitudes pédagogiques à avoir pour une catéchèse d’engendrement: Adapter notre pédagogie aux destinataires dans une école du sujet; respecter infiniment chaque élève dans une école d’humanisation; croire à l’éducabilité des plus blessés dans une école d’espérance; partir des représentations des destinataires dans une école de l’écoute et de la relation; questionner aux carrefours de l’existence dans une école de la décision; éclairer l’espérance chrétienne dans une école de foi et de vie; savoir s’effacer pour rendre libre à l’école du Maître intérieur et enfin être témoin à l’école de la joie évangélique.
A l’école du Christ pédagogue
Editions Saint-Augustin
Pierre Vianin et François-Xavier Amherdt
293 pages
38 francs
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