Cavalier seul
Vincent Pellegrini
Jean-Marie Guénois, correspondant à Rome du «Figaro» vient de
publier un livre sur le pape François aux éditions JC Lattès. L’ouvrage est
intitulé «Jusqu’où ira François?» Le pape de la miséricorde y est décrit
comme révolutionnaire, comme quelqu’un qui refuse que l’Eglise passe pour une
marâtre austère. Il est imprévisible et sait manier une main de fer dans un
gant de velours. En mai 2013, devant 250 évêques italiens médusés de se voir
reprocher leur «carriérisme», il tonnait (avant de donner à tous l’accolade!): «La perspective de la carrière, la flatterie
de l’argent et les compromis avec l’esprit du monde rendent l’évêque paresseux
en le transformant en un fonctionnaire,
un clerc d’Etat plus préoccupé par lui-même, par l’organisation et les
structures, que par le véritable bien du peuple de Dieu… On court alors le
risque, comme l’apôtre Pierre, de renier le Christ, même si l’on se présente et
que l’on parle formellement en son nom.» Le pape veut ouvrir l’Eglise aux
«périphéries», mais dans un esprit d’évangélisation car pour lui les chrétiens
doivent certes lutter contre la misère matérielle et morale, mais aussi ramener
à l’Eglise ceux qui n’y vont plus. Jean-Marie Guénois explique: «Le pape agace. La frange progressiste tout
d’abord. Les cathos de gauche apprécient son discours de gauche en matière
sociale, sa critique acide du libéralisme, de la finance et du Dieu argent. Ils
aiment sa volonté de prendre des décisions collégialement. Ils ont même cru un
temps avoir enfin leur pape, mais ils se sentent très gênés par cette volonté
ultra-missionnaire de François et son côté mystique. Ils vivent cet élan pour
l’évangélisation comme du prosélytisme tel que l’Eglise le pratiqua avant le
concile Vatican II. Ils ont toujours combattu cette annonce sans complexe de la
couleur catholique, à temps et à contretemps. Eux prônent encore la théorie de
l’enfouissement du levain dans la pâte, selon un axiome étrange qui a vidé les
églises en Occident: plus un chrétien se cacherait dans la société, plus il
serait attirant…» Le pape François lance aussi ses banderilles sur
les chrétiens pratiquants mais qui ne vivent pas vraiment leur foi et qui «s’étaient bien habitués à l’ordre calme et
sans à-coups de Benoît XVI, dont l’extrême délicatesse les ravissait.» Bref
une révolution est en marche.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire