jeudi 14 avril 2011

Vatican II, question ouverte

Article tiré de la revue Catholica
 
Ar­ticle pu­blié le 3 avr 2011
En­tre­tien. Le dis­cours pro­gram­ma­tique pro­non­cé le 22 dé­cembre 2005 par Be­noît XVI a ou­vert la boîte de Pan­dore dont on ima­gine mal qu’elle puisse se re­fer­mer avant qu’in­ter­vienne une cla­ri­fi­ca­tion d’en­semble.
C’est au­jourd’hui vers l’Ita­lie que l’on doit tendre l’oreille si l’on veut en­tendre des pa­roles et même des col­loques et dé­bats pu­blics où une ana­lyse du concile Va­ti­can II et de l’époque post-​conci­liaire s’énonce, sans at­té­nua­tion de la pen­sée ou, à l’in­verse, sans que soit agité, pour seule ré­ac­tion, le chif­fon rouge de l’ex­tré­misme.
Certes, en d’autres pays, la France no­tam­ment, et de­puis long­temps, une cri­tique construite s’est exer­cée et conti­nue, sauf, peut-​être, sur un plan his­to­rique, en tout cas avec une am­pleur qui puisse ri­va­li­ser avec des en­tre­prises dont la mo­nu­men­tale His­toire du Concile Va­ti­can II d’Al­be­ri­go est le pa­ra­digme. Tou­te­fois, re­con­nais­sons que cette cri­tique plus an­cienne n’est guère par­ve­nue à s’ex­traire du di­lemme entre pré­cau­tion de lan­gage et os­tra­cisme, qu’un cer­tain contexte ec­clé­sial im­po­sait.
Les temps, ce­pen­dant, sont autres : le dis­cours de Be­noît XVI à la Curie, le 22 dé­cembre 2005, a inau­gu­ré un contexte nou­veau dont l’Ita­lie semble être la pre­mière bé­né­fi­ciaire. Alors que la ré­flexion por­tait au­pa­ra­vant sur l’ap­pli­ca­tion du concile Va­ti­can II, puis sur sa ré­cep­tion, elle est re­mon­tée plus près de la source, au Concile lui-​même : l’af­faire main­te­nant est de sa­voir en quoi, à quel degré, et dans quels do­maines il y a conti­nui­té ou dis­con­ti­nui­té, tant dans l’in­ter­pré­ta­tion que l’on a don­née et conti­nue de don­ner de telle ou telle par­tie du cor­pus conci­liaire, que dans ce cor­pus lui-​même par rap­port à la doc­trine an­té­rieu­re­ment pro­fes­sée. Cet angle de ré­flexion s’est au­jourd’hui im­po­sé à tous, et celui qui a opéré ce bas­cu­le­ment au­to­rise sans aucun doute une pa­role plus libre, sans crainte de confi­ne­ment.
Ef­fec­ti­ve­ment, des thé­ma­tiques somme toute assez connues trouvent donc ac­tuel­le­ment en Ita­lie une au­dience in­édite. Parmi d’autres évé­ne­ments, l’on met­tra par­ti­cu­liè­re­ment en exergue un ou­vrage de Ro­ber­to de Mat­tei – l’une de ces études his­to­riques at­ten­dues –, et sur­tout un col­loque or­ga­ni­sé en dé­cembre 2010 par les Fran­cis­cains de l’Im­ma­cu­lée à Rome sur le ca­rac­tère « pas­to­ral » du Concile. Les pro­pos tenus ap­portent-​ils quelque nou­veau­té dans le conte­nu même de la cri­tique ? Il im­porte d’abord de re­le­ver qui sont ceux qui parlent et plus en­core les lieux nou­veaux où ils le font, sans doute plus larges, cer­tai­ne­ment plus proches des ins­ti­tu­tions de l’Eglise. Et l’oreille est ren­due plus at­ten­tive en­core quand l’œil, lui aussi, est at­ti­ré, sur fond de gris fran­cis­cain, par la pourpre car­di­na­lice cô­toyant le vio­let épis­co­pal ou le fi­le­tage des sou­tanes de nombre de pré­lats de la curie. Non qu’il y ait mon­da­ni­té, mais qui dé­dai­gne­rait l’im­por­tance de cette pré­sence pu­blique de la hié­rar­chie ec­clé­sias­tique, à deux pas du Va­ti­can : le contexte a ef­fec­ti­ve­ment bien chan­gé.
Mgr Bru­ne­ro Ghe­rar­di­ni entre dans ce cadre ita­lien qui néan­moins tend à s’in­ter­na­tio­na­li­ser par le juste in­té­rêt qu’il sus­cite ; il peut même, en quelque ma­nière, en être consi­dé­ré comme, sinon le chef de file, du moins l’éclai­reur de tête. Tout d’abord par l’ac­ti­vi­té édi­to­riale : en 2009, un livre très cri­tique sur le dia­logue œcu­mé­nique et in­ter­re­li­gieux, comme sur la « ju­déo-​dé­pen­dance » de l’Eglise comme il la nomme ; la même année, un livre sur le Concile Va­ti­can II, se ter­mi­nant par une sup­plique au pape lui en­joi­gnant d’en­tre­prendre enfin l’in­ter­pré­ta­tion ma­gis­té­rielle au­then­tique de cer­tains des do­cu­ments conci­liaires ; en 2010, une im­por­tante li­vrai­son de la revue Di­vi­ni­tas consa­crée en­tiè­re­ment à une cla­ri­fi­ca­tion his­to­rique et théo­lo­gique de ce qu’est la Tra­di­tion dans l’Eglise, de­puis pu­bliée en livre ; en 2011, un nou­vel ou­vrage, dont on par­le­ra plus loin. [...]

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